Marrakech et son patrimoine récent : Guéliz

Immeuble Martinet à Casablanca construit par Pierre Bousquet en 1919 (photo prise sur Pinterest)

Marrakech et son patrimoine récent : Guéliz

Quartier Guéliz à marrakech

un des symboles de la ville inscrite sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, et dans une moindre mesure, sa palmeraie aux tristes palmiers qui n’a à offrir que luxueuses villas, palaces et golfs pour une clientèle en mal d’exotisme. S’il y a actuellement un intérêt pour la « ville nouvelle » construite sous le Protectorat français, il ne concerne malheureusement pas son aspect architectural et patrimonial mais plutôt sa vie économique « à l’occidentale ».

Immeuble Martinet à Casablanca construit par Pierre Bousquet en 1919 (photo prise sur Pinterest)

Depuis quelques années, le patrimoine récent de la ville de Casablanca s’est vu sauvegardé et mis en valeur touristiquement, grâce, notamment, à l’action de l’association de sauvegarde du patrimoine Casamémoire ([i]).

Le 27 novembre 2013, le centre du patrimoine mondial de l’Unesco a inscrit la ville blanche sur la liste indicative du patrimoine mondial. Ainsi, considérant les efforts entrepris par l’association Casamémoire, le Ministère de la Culture renforce la convention étroite établie depuis plusieurs années avec cette structure associative. Cette initiative permet d’agir en commun par le biais d’un comité d’accompagnement pour promouvoir le patrimoine architectural casablancais et de préserver ce témoignage historique et culturel que sont, entre autres, les bâtiments de style Art déco.

Immeuble de la Société Générale (rue de Yougoslavie) Marrakech – photo I.Six

Marrakech, contrairement à la capitale économique, ne bénéficie pas d’une telle attention car la ville ocre posséderait suffisamment de ressources touristiques et patrimoniales et serait mise en avant pour son caractère « authentique » et sa culture vivante. Les bâtiments érigés durant l’époque du Protectorat et subsistant encore à l’heure actuelle n’ont jamais fait l’objet d’un inventaire.

Leur nombre, diminuant sensiblement sous l’action destructrice des promoteurs immobiliers, est inconnu et les archives à leur sujet font cruellement défaut. La valeur architecturale ou monumentale, contrairement à Casablanca, n’a jamais été une référence du bâti récent à Marrakech, mais il y a fort à parier qu’une mise en tourisme du quartier de Guéliz constituerait une véritable ressource économique, valorisable à long terme.

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Immeuble Martinet à Casablanca construit par Pierre Bousquet en 1919 (photo prise sur Pinterest)
Immeuble Martinet à Casablanca construit par Pierre Bousquet en 1919 (photo prise sur Pinterest)
Immeuble de la Société Générale (rue de Yougoslavie) Marrakech – photo I.Six
Immeuble de la Société Générale (rue de Yougoslavie) Marrakech – photo I.Six

La Villa Bel-Air (à droite) sur l’Avenue du Haouz en 1919

La notion de patrimoine récent dans un pays du Maghreb est intimement liée à la venue des Européens sur le territoire africain. En signant le traité de Fès le 30 mars 1912, le sultan Moulay Abd el-Hafid (1908-1912) acceptait le protectorat de la France sur ses États.

Hubert Lyautey, nommé résident général par décret du 27 avril 1912, établit son quartier général auprès du Consulat de France à Casablanca avant de le transférer à Rabat. Il exerce l’autorité suprême tandis qu’un rôle symbolique est conservé au sein de l’Empire chérifien en la personne du sultan.

Lyautey désire valoriser le Maroc en exerçant certaines transformations tout en conservant les coutumes et les traditions locales. Parmi ces modifications, le développement de l’urbanisation du

La Villa Bel-Air sur l’actuelle avenue Hassan II – photo Antoine Gély (2007)

pays, témoin de la présence française, contribue à l’édification du nouveau Maroc. Au début du 20ème siècle, les Européens commencent à s’installer au Maroc sans réel plan d’aménagement et de manière totalement anarchique. Le modèle islamique de la ville de Marrakech se trouve confronté à la mise en place d’un modèle fonctionnaliste occidental. La redéfinition économique et foncière entraîne un bouleversement de la société urbaine et l’arrivée des Français provoque de nombreuses modifications, notamment au niveau du tissu urbain d’origine. Marrakech va s’amplifier et se transformer sensiblement. En effet, entre 1910 et 1925, la médina de Marrakech connaît un exode massif et une explosion démographique qui atteint un point culminant dès 1950 avec 186 000 habitants, soit le double par rapport à 1912. La médina est préservée mais aucune extension n’est programmée ce qui conduit à une exploitation anarchique du moindre espace disponible. A partir de 1912, de nouveaux quartiers s’ajoutent, le premier étant celui de Guéliz, construit sur la base militaire entre les remparts de la médina et le jbel Guéliz ([ii]).

Dès sa nomination en tant que résident général, Lyautey va se préoccuper des questions d’urbanisme. Sur recommandation de Jean Claude Nicolas Forestier, il fait venir au Maroc l’architecte Henri Prost et le nomme « Directeur du service spécial d’architecture et des plans des villes » en février 1914. Celui-ci, prix de Rome en 1902, lauréat de nombreux concours, n’est pas un néophyte. Il a déjà remporté le premier prix du concours international pour le plan d’extension d’Anvers en 1910 et ses dessins de restauration de Sainte-Sophie sont exposés au Salon des artistes français qui lui décerne la médaille d’honneur en 1911. La même année, il fonde, avec Agache, Auburtin, Bérard, Forestier, Hénard, Hébrard, Jaussely, Parenty et Redont, la Société française des urbanistes (SFU). Dans le cadre de la loi du 4 mars 1919 sur les plans d’aménagement des villes, il est chargé en 1923 du plan directeur de la côte varoise. Entre 1936 et 1951, dans le cadre des réformes engagées par Mustafa Kemal visant à moderniser la Turquie, Prost est nommé urbaniste d’Istanbul et chargé d’établir le plan directeur.

Au Maroc, il établit les plans directeurs de Casablanca, Rabat, Fès, Meknès, Marrakech et élabore le projet pour la Résidence générale de Rabat. Il quitte le Maroc en 1923 mais poursuivra l’œuvre commencée depuis la métropole. Séparer complètement villes indigènes et villes européennes, protéger le patrimoine culturel de l’empire chérifien et appliquer aux villes nouvelles les principes les plus modernes et les plus raffinés de l’urbanisme contemporain, c’est la tâche qui est confiée à Henri Prost. La spatialisation de ces orientations conduit l’urbaniste vers une architecture nouvelle au Maroc : épurée, dépouillée, enrichie de quelques éléments empruntés à la décoration locale. Ce que Prost appellera lui-même « des œuvres nettoyées des extravagances arabisantes ».

La Villa Bel-Air (à droite) sur l’Avenue du Haouz en 1919
La Villa Bel-Air (à droite) sur l’Avenue du Haouz en 1919
La Villa Bel-Air sur l’actuelle avenue Hassan II – photo Antoine Gély (2007)
La Villa Bel-Air sur l’actuelle avenue Hassan II – photo Antoine Gély (2007)

Premier plan cadastral de J. Raynaud, régi par quartiers et disposé en étoile (vers 1912)

Lyautey est persuadé que la ville nouvelle, qui sera habitée exclusivement par des Européens, doit être régie par quartiers possédant chacun une fonction clairement définie : des casernes militaires, des gares, des bâtiments administratifs reliés par un réseau routier, des zones résidentielles, industrielles, commerciales et des jardins disposés soigneusement. Lyautey insiste sur la séparation de la nouvelle ville et de la médina afin d’assurer une autonomie entre les deux populations et l’affirmation du respect de la culture locale. Il s’agit aussi, d’un point de vue stratégique, de garder une certaine maîtrise en cas de troubles.

Les murailles centenaires entourant la vieille ville étant uniformément de couleur ocre rouge, Lyautey impose à la ville nouvelle la même couleur à toutes les constructions. Dès ce moment, les deux villes, ancienne et nouvelle, sont unies par une même identité, celle de la ville ocre. A la différence des autres villes nouvelles du Maroc, construites de manière à exalter la perspective sur des éléments architecturaux qui étaient les symboles du pouvoir, celle de Marrakech doit valoriser la « spectacularisation » de ses paysages déjà présents naturellement. Lors de la planification urbaine, Lyautey choisit volontairement de limiter la hauteur des édifices à trois étages afin qu’aucun ne puissent entraver le panorama du paysage. Leur décoration doit être définie par des « lignes sobres et modernes qui s’adaptent parfaitement au cadre de la ville ». L’harmonie avec la nature et la perspective sur l’Atlas ou sur la Koutoubia, forment toutes deux la skyline, ligne d’horizon caractéristique de Marrakech.

Avenue Mangin dans les années 1930 (actuelle avenue Mohamed V)

De larges avenues bordées d’arbres et de jardins sont créées dans lesquelles sont érigés des édifices publics, des commerces, des habitations. Tout part de l’actuelle « Place du 16 novembre », appelée alors « Place du 7 septembre », date à laquelle les Français entrèrent à Marrakech sous le commandement du colonel Mangin en 1915. De ce carrefour partaient en étoile les principales voies de Marrakech, dont l’avenue de la Koutoubia reliant la nouvelle ville au cœur de la médina. Cette artère changea plusieurs fois de nom au cours des décennies : dans les années ’20, elle prit le nom de Guéliz puis de Mangin dans les années ’30. C’est alors que les trottoirs et l’éclairage public apparaissent. Elle prend enfin son nom actuel d’ « Avenue Mohamed V » le 16 novembre 1956 à l’occasion du retour d’exil du roi Mohamed V. La place se transforme dans les années ’40. Les palmiers disparaissent, le carrefour se dessine, la grande poste s’érige et le béton apparaît.

Hôtel des Voyageurs (boulevard Mohamed Zerktouni) Marrakech – photo I. Six

Un style Art Déco fleurit dans les années 1920-1930. Les constructions sobres et fonctionnelles évitent toute monumentalité arrogante. Les éléments décoratifs orientaux sont subtilement et discrètement intégrés :

coupole, lanternon, ornement en zellige ou en bois tel que moucharabieh. On se retrouve face à un processus d’hybridation de l’architecture.

Une architecture d’un nouveau style, à tendance marocaine apparaît, basée sur un mélange entre le modèle de référence français et le savoir-faire local. Dès lors, suite à des décennies d’urbanisation sous le régime du protectorat français, on peut parler d’un bâti architectural et urbain récent au Maroc.

Premier plan cadastral de J. Raynaud, régi par quartiers et disposé en étoile (vers 1912)
Premier plan cadastral de J. Raynaud, régi par quartiers et disposé en étoile (vers 1912)
Avenue Mangin dans les années 1930 (actuelle avenue Mohamed V
Avenue Mangin dans les années 1930 (actuelle avenue Mohamed V
Hôtel des Voyageurs (boulevard Mohamed Zerktouni) Marrakech – photo I. Six
Hôtel des Voyageurs (boulevard Mohamed Zerktouni) Marrakech – photo I. Six

La Poste et Télégraphes, 1920

Au cours de cette période, Lyautey fait alors construire ses administrations. L’ancien bâtiment des Postes et Télégraphes est devenu l’actuelle Office du Tourisme.

Il implante la Banque du Maroc au cœur de la médina afin de garder un certain contrôle sur la population locale. De cette époque datent une série de bâtiments tels que le marché central, la Villa Bel-Air, les deux lieux de cultes chrétiens, une série de cafés sur la Place de l’Horloge, un jardin urbain et cinq cinémas, pour ne citer que quelques exemples.

L’entrée du vieux marché central

Le Marché central, marché de frais, proposait 76 commerces, dont des fleuristes, des potiers et des marchands de légumes, de fruits et de poissons. De style art déco en arcades, il était en partie à ciel ouvert. Lieu de rencontres par excellence, on pouvait y croiser des personnalités comme Yves Saint-Laurent ou la comtesse de Deauville ! Alors qu’il comptait jusqu’à 196 magasins, le marché est détruit début 2005 pour être remplacé en 2013 par le Carré Eden. Considéré comme une vieille bâtisse, anarchique et insalubre, l’ancien marché de Guéliz ne relève pas du patrimoine et il convient de le remplacer par un complexe multifonctionnel sans originalité où sont regroupées toutes les enseignes internationales.

Située avenue Hassan II, la Villa Bel-Air est l’une des plus anciennes villas de l’époque et semble résister à la fougue dévastatrice des promoteurs immobiliers. Elle se démarque par son style architectural très atypique. Un chalet normand en plein cœur de Marrakech ! Elle appartenait à une famille juive influente de la ville, également propriétaire de plusieurs biens de la médina.

L’Église des Saints-Martyrs de Guéliz, édifiée à la fin des années 1920, possédait une dépendance qui comptait des milliers d’ouvrages, notamment sur l’histoire de Marrakech et du Maroc. Cette bibliothèque gérée par une mécène française fut scellée lorsque celle-ci mourut il y a quelques années. De 2000 à 3000 ouvrages ont ainsi été déplacés dans une petite chapelle située dans le quartier de la gare. Fermée depuis une dizaine d’années, c’est l’Archevêque de Rabat qui en détient les clés. Sur une de ses façades, la bâtisse porte la date de sa construction : 1919.

 

La Poste et Télégraphes, 1920
La Poste et Télégraphes, 1920
L’Eglise des Saints-Martyrs de Guéliz, 1930
L’Eglise des Saints-Martyrs de Guéliz, 1930
L’Horloge avec lanterne, 1930
L’Horloge avec lanterne, 1930
L’entrée du vieux marché central
L’entrée du vieux marché central
La chapelle de 1919 – photo I. Six
La chapelle de 1919 – photo I. Six

L’Horloge avec lanterne, 1930

Au cœur du quartier de Guéliz se trouve l’ancienne Place de l’Horloge (actuelle place Abdel Moumen ben Ali). Appelé aussi le « carrefour des 3 cafés », on y trouve le café des Négociants construit en 1936, le café Grand Atlas (1945) et l’Hôtel de la Renaissance (1952), tous trois datant de l’époque du Protectorat. En 1915, ce carrefour ne comprend que l’ancienne Poste et Télégraphes, actuellement transformée en délégation régionale du Tourisme, le Grand Café et quelques « commerces ». En 1930, une horloge est dressée au milieu de la place, surmontée d’une lanterne pour que les passants puissent lire l’heure la nuit.

En 1936, le Café des Négociants est construit et l’horloge doit être déplacée en retrait sur le trottoir. Un rond-point remplace l’horloge. Quinze ans plus tard, le Café du Grand Atlas remplace le Grand Café, l’Hôtel de la Renaissance s’élève au-dessus de tout Marrakech en 1952. En 1957, l’horloge est rénovée et sa lanterne disparaît. Dans les années 1980, l’horloge disparaît complètement : enlevée, volée ?

La tour « berbérisante » du Jnane el-Harti – photo I. Six

La création du jardin urbain Jnane El Harti remonte à la fin des années 1930 mais existe à l’origine selon le plan conçu par Prost. Dans le projet initial de Prost, le jardin du Harti occupe la plus grande partie du quartier de l’Hivernage. Il s’étendait jusqu’à l’actuelle avenue de Paris. En réalité, ce nom est un pluriel, « janân al-harthî », qui signifie littéralement, les « jardins de ma terre labourée ». Si Forestier conseille de créer au sud-ouest de la place appelée plus tard place du 16 novembre, le jardin public de la ville nouvelle, c’est qu’il y avait déjà là, antérieurement, un jardin et verger destiné à produire de la nourriture, ce qu’on appelle, justement, un jnan comme on trouvait, plus à l’ouest, un autre verger remarquable, celui de la Ménara. L’actuel Jnane El Harti occupe six hectares et est devenu un espace fermé où sont construits de façon plus ou moins légale des logements, des salles de sport ou des centres de formation. Aujourd’hui, Jnane El Harti a retrouvé sa fonction première : un jardin de repos et de détente agrémenté de bancs en bois et en fer forgé. Le grand bassin se nomme bassin des phœnix. En forme de croix et pourvu de nombreux jets d’eau, il mesure une centaine de mètres. Deux nichoirs à pigeon, semblables aux tours de surveillance des jardins des oasis des vallées présahariennes ont été ajoutés à cet espace pour donner une touche « berbérisante ». Ils servaient à la fois à dépayser les Européens de passage tout en étant placés dans un espace familier de pelouses et de massifs de fleurs inconnus des jardins marocains de l’époque. Dès sa création, le parc est un espace mixte : méditerranéen par sa végétation (oliviers, agrumes ou ficus), européen par ses pelouses et ses arbustes de bord d’allées et par la conception de ses massifs de fleurs. La plantation des palmiers est récente.

La salle en plein air du Cinéma Palace – photo I. Six

Le cinéma s’est développé au Maroc sous le Protectorat dans les années 1920. A Marrakech, la première salle de cinéma voit le jour dans la médina en 1925 avec l’Eden. Cinq autres salles s’ouvriront à Guéliz : le Régent, le Paris, le Lux, le Colysée et le Palace. Le cinéma Palace, construit dans les années 1940 proposait deux salles, l’une couverte et l’autre en plein air pour la saison estivale.

Paradoxalement, alors que l’industrie cinématographique marocaine est actuellement en plein essor, 20 longs métrages sont produits par an dans le pays, les salles de cinéma, elles, ferment les unes après les autres.34 salles en 2013 contre 280 il y a trente ans. La dynamique association Save Cinemas in Morocco tente par tous les moyens de conserver le cinéma Palace en y organisant des projections de films, des visites guidées, des expositions, des spectacles, afin de sensibiliser les Marrakchi à leur patrimoine, à leur histoire et à leur culture ([iii]).

Au cours des deux décennies suivantes, des volumes plus amples se développent de manière manifeste à Casablanca. A Marrakech, l’exemple de l’Hôtel de la Renaissance se démarque des autres constructions par son allure de gratte-ciel : il dépasse largement les trois étages requis. Lyautey aurait dérogé à la règle pour en faire une tour de contrôle et permettre d’avoir un panorama exceptionnel sur la ville et une vue imprenable sur l’Atlas.

Alors que Casablanca se veut la concrétisation spatiale du projet colonial de « renaissance » économique du pays, Rabat la spatialisation du pouvoir et la célébration de l’action de Lyautey au Maroc, la conception du quartier de Guéliz – ville nouvelle de Marrakech – exprime définitivement la fonction de la ville rouge : la ville du tourisme, de la distraction, de la flânerie et des plaisirs.

La tour « berbérisante » du Jnane el-Harti – photo I. Six
La tour « berbérisante » du Jnane el-Harti – photo I. Six
Nour-Eddine Tilsaghani, Re-naissance, 2006
Nour-Eddine Tilsaghani, Re-naissance, 2006
La salle en plein air du Cinéma Palace – photo I. Six
La salle en plein air du Cinéma Palace – photo I. Six

Nour-Eddine Tilsaghani, Re-naissance, 2006

Dans les années qui suivent l’Indépendance, le quartier de Guéliz se « marocanise » et y vivre devient une véritable promotion sociale pour les Marrakchi. Son activité commerciale, après avoir connu une période creuse suite au départ des Français en 1956, est étroitement liée à l’augmentation de la population marocaine aisée et étrangère. A partir des années 1960, le tourisme à Marrakech ne cesse de se développer et la ville ocre devient une étape privilégiée pour les touristes qui souhaitent se rendre dans le Sud. Pour faire face à ce phénomène de développement socio- économique, les acteurs du tourisme mettent en place un nouveau plan de construction d’infrastructures de luxe au détriment de la valorisation et de sauvegarde du bâti récent de Guéliz. De nombreuses villas riches en valeur historique ont ainsi été détruites par manque de dispositifs de réglementation quant à la protection du bâti récent. Les terrains sont mis en vente par des agences immobilières sans scrupule, les habitations sont détruites et rapidement remplacées par des immeubles à appartements de 5 étages beaucoup plus rentables. La situation est alarmante et d’ici peu le patrimoine architectural de l’époque du protectorat risque de disparaître complètement à Marrakech si aucune action concrète de valorisation touristique n’est entreprise par les acteurs publics du tourisme.

I. Six

>Bibliographie

La rédaction de cet article a été inspiré par la conférence présentée par Rachel THOMANN au Café littéraire Dar Chérifa à Marrakech, le 22 mars 2014. Rachel Thomman a réalisé un travail de terrain à Marrakech durant neuf mois, de mars à décembre 2013 dans le cadre de son mémoire de fin d’études en Tourisme à l’Institut universitaire Kurt Bösch de Sion (Suisse). Son mémoire, présenté avec succès, est actuellement en cours de publication.

Rachel THOMANN, Marrakech et sa ville nouvelle : tourisme et « patrimoine récent » à Guéliz, mémoire de recherche présenté à l’Institut Universitaire Kurt Bosch (IUKB), Sion, 2013.

Rachel THOMANN, conférence « Le patrimoine récent à Marrakech », Dar Chérifa, Marrakech, 22 mars 2014.

Jnan Harti, in « Jardins du Maroc » n°14, http://www.benchaabane.com/Jnan-Harti_a1901.html

Guillaume JOBIN, Lyautey le résident, Magellan & Cie, 2014.

les photos anciennes proviennent du site http://mangin2marrakech.canalblog.com (sauf mention particulière)

[i] Casamémoire est une “Association de sauvegarde du patrimoine architectural du XXe siècle au Maroc” dont le site internet est http://www.casamemoire.org

[ii] Guéliz est le nom du quartier « européen » de Marrakech créé par Henri Prost, à la demande d’Hubert Lyautey. Ce mot provient du Jbel Gueliz, massif de grès rouge situé au nord-ouest de la ville et dont la pierre servit de matériau de construction aux premiers bâtiments.

[iii] L’association « Save cinemas in Morocco » a été fondée en 2007 par Tariq Mounim dans le but de préserver les salles de spectacle du royaume et de promouvoir le cinéma auprès du public marocain. T. Mounim a également redynamisé le Cinéma Palace de Marrakech, laissé à l’abandon, avec l’association « Les amis du Cinéma Palace ». Toutes deux sont possèdent leur page Facebook.

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